Danton Bacchiocchi naquit à Bédarrides en 1922. À dix-huit ans, il s’engagea dans la marine.

Il signa, en présence de ses parents, l’enrôlement pour trois ans à compter du huit avril 1940.

 

Le 18 juin 1940, il était affecté à Brest au moment où les troupes allemandes fonçaient sur le port.

En début d’après-midi, il reçut l’ordre d’évacuer au plus vite le dépôt et de se diriger vers un des bâtiments de guerre, le Vauquois, le Richelieu ou le Tarn pour embarquer.

Les rues noires de monde, les Bretons saluaient le départ des troupes, mais la tristesse marquait leurs visages.

Le groupe de six cents matelots monta à bord du Tarn et les deux autres navires de guerre ne pouvaient plus contenir de passagers.

L’embarquement terminé, les trois bateaux quittèrent la rade selon un ordre établi, le Richelieu, puis le Vauquois suivis du Tarn.

 

 


À peine l’étroit goulet du port franchi, à la hauteur du Conquet, une mine dérivante larguée par la Luftwaffe coula le Vauquois. La mer se transmua en tapis de débris humains et d’objets inertes. Pour Danton jeune incorporé, ce fut l’effarement. S’il y avait eu de la place, il aurait été parmi les victimes.
 
Malgré le survol par l’aviation allemande et l’envoi d’engins explosifs flottant l’aviso naviguait vers le sud. Dans l’ignorance de la destination, tout le monde formulait des hypothèses. C’était l’Angleterre, Casablanca, ou Dakar. Pour le moment le cap indiquait le midi. L’heure de la soupe c’était pour la troupe des biscuits de guerre. Le commandement n’avait pas anticipé les évènements, le repas normal était réservé à l’ensemble du personnel navigant. Danton avait écrit je cite : « … nous sommes quelques copains à nous diriger vers le poste de radio pour avoir quelques nouvelles de la situation, nous entendons la BBC Londres qui nous annonce un appel du général de Gaulle, le fameux appel du 18 juin… » C’était une exception, ce discours fut très peu perçu sur le moment, il n’avait pas été enregistré, la version sonore connue datait du 22 juin 1940.
 
Le Tarn, depuis son départ de Brest mouillait à Bordeaux, à l’amarrage du Verdon. Ensuite, le navire eut l’autorisation de filer en direction de Casablanca, il y arriva le 26 juin. Après un séjour de repos, début juillet, l’équipage en autocar fonça vers Mogador, devenu Essaouira, et là il fut logé dans l’école de la ville située en bordure de la plage. Après un passage d’un mois, les matelots promenés depuis Brest embarquèrent sur une barge plate tirée par un remorqueur vers le large, où l’aviso « Dubourdieux » les attendait, pour les reconduire à Casablanca.
 
Pour Danton, le périple africain s’arrêta en 1941, ce fut l’embarquement d’Oran vers la France à bord du « Dal-Piaz » et son domicile. Ce fut une grande surprise pour ses parents, leurs soucis existaient par ignorance de son sort, ils en furent brutalement stoppés.Danton participa, le 27 novembre 1942, au sabordage de la flotte à Toulon.
 
Un peu plus tard il reçut des mains du gendarme Tolozano un ordre de se rendre à la caserne Desalle. L’autorité militaire lui indiquait de se munir de sa garde-robe en vue de son départ pour le S.T.O. (Service du Travail obligatoire en Allemagne). En compagnie de Georges Daruty, tous deux anciens marins du croiseur Dupleix ils décidèrent de ne pas répondre à la convocation et de rejoindre le « Maquis ». Ils se mirent en rapport avec Louis Décés, chef de la Résistance, celui-ci leur donna tous les détails et mots de passe pour rallier le Maquis du Luberon à Pertuis.
 
Leurs sacs de marin solidement attachés sur un vieux vélo, ils se lancèrent pour la grande aventure. Ils avaient soixante-dix kilomètres à accomplir à pied. En passant devant la boulangerie, Durand Roger leur donna trois baguettes de pain. Grâce aux renseignements fournis, ils purent, à l’aide des paysans patriotes, être conduits à travers champ et éviter la milice ou les GMR. (Groupes mobiles de réserve). En passant à la hauteur de Caumont le vélo se brisa en deux sans possibilité de le réparer, donc chacun d’eux prit la moitié du chargement porté par le cycle en plus du sac de marin. Ensuite, ils continuèrent leur chemin et dormirent une partie de la nuit à Puget sur Durance. Ils arrivèrent à Pertuis la ville était investie par les GMR. Avec la certitude de ne plus être envoyé comme travailleur forcé en Allemagne (STO) il revint au domicile de ses parents.
 
Le 24 août 1944, vers 23 heures, de fortes déflagrations se firent entendre. Les nazis avant de s’enfuir détruisirent le dépôt de munitions d’Entraigues. Quatre Bédarridais Gustave Cloupet, Danton Bacchiocchi, Loulou Barreme et Claude Winiarski allèrent au sommet de la colline Montréal à Bédarrides afin de localiser le lieu de l’explosion. À l’époque, la zone qui séparait Bédarrides et Entraigues était une vaste plaine peu habitée. De retour au village surgit une voiture de l’armée occupante, terrorisée à la vue des quatre jeunes gens. Ils cédèrent à la panique, l’un d’eux leur lança une grenade qui tua Claude Winiarski sur le coup, Gustave et Danton blessés, seul Louis sortit indemne.
 
Une plaque, « À la mémoire de Claude Winiarski tué par les Allemands le 25 août 1944 », est scellée au pont de l’Ouvèze ». En relation avec son rôle pendant la Seconde Guerre mondiale, Danton fut décoré de la « Croix du combattant volontaire guerre 1939-1945 », « Croix du combattant volontaire de la Résistance » de la « médaille des blessés de 1939-1945 ».
 
Je remercie la famille de Danton Bacchiocchi. Elle m’a fourni la totalité des documents qui m’ont servi à rédiger cet article.
 
Raymond CHABERT
 
Au cours de la nuit du 24 au août 44, j’ai très bien entendu les explosions. À la Libération, on racontait que les nazis avaient attaché un militaire sénégalais près des explosifs. Il se serait libéré et il aurait neutralisé une partie de la réserve de dynamite. Il évita ainsi de gros dégâts.Qui peut me confirmer ou m’infirmer cette assertion ?